jeudi 12 novembre 2015

L’histoire de « Şalcı Bacı », la dame qu’Atatürk a fait pendre pour opposition à sa réforme du chapeau

Il est étonnant de voir comment Atatürk, le dictateur sabbatéen et crypto-juif, est présenté comme quelqu’un qui était soucieux des femmes et comme un « libérateur » qui a leur donné des droits qu’elles avaient (supposément) pas avant. On nous ressasse sans arrêt le droit de vote qu’il leur a accordé sans préciser au passage qu’à ce moment, il y avait que le parti d’Atatürk (le CHP) et que toute opposition était interdite. De même, il a à un moment donné, formulé une phrase (parmi beaucoup d’autres) que ses adorateurs reprennent pour démontrer sa supposée « grandeur ». 
Hé, l’héroïne femme turque ! Tu es digne d’être élevée sur les épaules vers les cieux et non à être trainée au sol. 
Quelle grandeur d’âme n’est ce pas ? Mais en même temps ce même Atatürk avait aussi transformé le palais présidentiel en bordel et y faisait venir de jeunes filles de toute la Turquie pour en profiter et les éloigner en Europe comme des malpropres une fois qu’il avait fini ses sales besognes pour passer aux prochaines. 

Mais ce n’est pas tout. Le pire est qu’il a même mené des femmes à la potence (parmi des milliers d’hommes) pour installer définitivement par la terreur ses réformes occidentales comme le port du chapeau. La première à avoir subit le courroux du dictateur Mustafa Kemal a été une dame qu’on appelait Şalcı Bacı à Erzurum. Une vieille dame occupée à gagner quelques sous en vendant des bouts de tissus et foulards aux habitants. Son crime ? Elle a critiqué la loi obligeant le port du chapeau anglais contre l’abandon du fez désormais interdit. Voici le récit (par un journaliste en 2008) de cette victime du kémalisme qui a subit les méthodes dictatoriales d'Atatürk que certains considèrent encore aujourd’hui comme une lumière. 

***************************************
L’année 1926… nous sommes à Erzurum… Il y a dans la ville un léger frisson… Une femme va être pendue… On ne condamnait pas les femmes à la peine capitale sous les ottomans… Une potence a été installée au milieu d’une place… Les gendarmes emmènent une dame… La dame est voilée… A cette période toutes les femmes étaient voilées en Anatolie… Quel est le crime de cette dame ? Elle a critiqué la nouvelle loi du port du chapeau… 

Cette dame est une citoyenne connue sous le nom de « Şalcı Bacı » (madame foulards) et qui vend toutes sortes de tissus et foulards. Alors qu’elle est amenée à la pendaison il est dit avec l’accent d’Erzurum « Kadın şapka giye ki asıla... » (que la femme mette un chapeau et qu’elle soit pendue). La dame proteste, résiste, elle se fait trainer, elle va être pendue… 

Les gendarmes amènent la dame vers potence tant bien que mal. Le bourreau au visage sombre est là… Il passe la boucle graissée autour du cou de la dame, et tire la chaise qui est sous pieds. Le corps de la dame tremble, vacille… Des murmures d’agonies sortent de la gorge de Şalcı Bacı. Est-ce qu’a-t-elle pu lors de cette dernière minute et seconde dire la Shahada (profession de foi) ? Inshaallah qu’elle l’ai pu. Le bourreau tire rapidement par les jambes de la femme, la nuque se brise. La dame meurt. Son corps vacille sous la potence avec le vent du matin. On entend la voix tremblante de l’appel à la prière… 

Celui qui a donné l’ordre d’exécution de cette dame est le grand père de Cetin Altan, Tatar Hasan Pasha. Altan a écrit ces quelques lignes à ce sujet : 
Mon grand père Hasan Pasha était un militaire très dur. Alors qu’Ismet Pasha était étudiant dans l’école d’artillerie, Hasan Pasha était le directeur de l’école. Par la suite, les commandants populaires qui étaient des étudiants de l’époque décrivaient souvent la dureté de Hasan Pasha. Quand il avait été missionné pour mater une rébellion dans une ville, il n’avait pas pu se contrôler et avait pendu une femme. Je crois que c’est la première femme à avoir été pendue pour une infraction politique dans notre histoire. Alors qu’on l’emmenait à la potence elle aurait dit « Je suis une dame. Qu’est ce que je peux avoir à faire avec les chapeaux ? ». Je n’étais pas encore né à cette date. J’ai appris ces histoires bien plus tard. Et croyez moi il m’est resté comme une aigreur légèrement douloureuse et amère en moi. 
Quand le journaliste Nimet Arzik a eu connaissance de cet événement, il a écrit quelques lignes sur l’histoire (véridique) et a titré ses écrits de cette manière : « Şalcı Bacı Asılmaya Gidiyordu » (Şalcı Bacı allait se faire pendre). 

Tout Erzurum avait pleuré le jour où Şalcı Bacı a été pendue. C’était un délit de pleurer en public lors de pareilles journées d’horreur. Ca revenait à dire qu’on s’opposait au régime et aux réformes. Les habitants d’Erzurum s’étaient alors reclus chez eux et avaient pleuré en silence. Şalcı Bacı était devenue une martyre. Ils avaient assassiné Şalcı Bacı. 

Iskilipli Âtif Efendi pendu en place publique
Cette pauvre femme n’était pas la seule musulmane à avoir été pendue à cause du chapeau. Combien d’exécutions avaient été orchestrées dans différents coins du pays. Des oulémas comme Iskilipli Âtıf Efendi, le müftü de Babaeski et encore des milliers de personnes… 

Şalcı Bacı avait été pendue pour opposition à la loi du chapeau. Elle était seulement une femme qui vendait des étoffes. Son paquetage adossé à son dos rempli de tissus, chiffons, foulards, elle allait de maison en maison vendre quelques bricoles pour gagner de quoi manger. Est-ce qu’elle avait un mari, des enfants ? Je ne sais pas. Elle avait forcément des gens qui l’aimaient et qui ont eu mal pour elle. Ils avaient beaucoup pleuré mais les larmes ne ramenaient pas les morts. 

Ils ont pendu Şalcı Bacı, ont exposé son corps vacillant sous la potence un ou deux jours pour faire peur au peuple et les faire sombrer dans l’horreur et ils l’ont par la suite enterré dans une fosse. Est ce que son corps a été lavé, enveloppé dans un linceul, est ce que sa prière a été réalisée, est ce qu’on a demandé sa miséricorde ? 

A l’époque, il était un grand crime de demander la miséricorde d’Allah pour un rebelle pendu pour opposition à la loi du chapeau. 

Est-ce que la tombe de Âtıf Efendi est connue ? 

Que sont devenues les plaintes de Şalcı Bacı ? Elles ont été délaissées. Les musulmans de ce pays n’ont pas cherché les droits de Şalcı Bacı. 

Il y a la démocratie, il y a peu ou prou de liberté de pensée mais il n’y a même pas eu d’initiative afin de laver l’honneur de Şalcı Bacı. 

Şalcı Bacı aurait été blanchie s’il y avait eu un intérêt dans cette affaire, mais il n’y en avait pas. Les islamistes de façade ne passent pas à l’action sans intérêt, ils ne bougeaient même pas leur petit doigt. 

Şalcı Bacı Şalcı Bacı… quel était son vrai prénom ? Combien de personne ont récité un Al-Fatiha et trois Ihlas pour elle ? Y-a-il eu quelqu’un qui a lu un Yâsin ? 

80 années se sont maintenant écoulées, serait-il serait possible (islamiquement) de faire la prière du défunt par contumace ? 

Ah Şalcı Bacı… J’ai honte en tant que musulman. 

Rien que les plaintes d’une Şalcı Bacı peuvent suffire à plonger le pays dans de sinistres obscurités. Il y a encore tant d’autres plaintes. 

Je demande la miséricorde pour Şalcı Bacı, pour ceux qui ont pourri dans les prisons, les miséreux qui ont souffert en exil, ceux qui ont été opprimés dans d’autres pauvres contrées. 

Malheur malheur malheur aux criminels. 

Si je savais quoi dire aux musulmans insoucieux et infidèles… 

Le mieux est de se retirer dans un coin et de pleurer. 


Mehmet Şevke Eygi 
Journaliste écrivain 
19 Décembre 2008 

Partager